Un nouveau départ lupin

Donovan admirait son nouveau compagnon, un petit louveteau noir aux yeux rouges. Je dois lui trouver un nom, Fenrir? non trop connu un nom qui inspire ce qu'il est. Donovan se rappela d'un mot qui était dans livre qu'il avait lu dans sa jeunesse qui parlait de feu et de loups. Ce mot était plutôt un nom, celui du héros d'une vieille croyance que le grand père des héros avait raconté aux personnages principaux. Bien sur tout ceci était fictif pour lui mais le nom lui était resté en tête. Je vais l'appeler Eldurulfur, vérifions si il aime ce nom
Donovan baissa les yeux vers son nouveau compagnon, sourit "Eldurulfur, ça te va comme nom?"
Le louveteau le regarda et sembla heureux de son nom. Alors Donovan voulu le caresser mais à peine il avait approcher sa main que le louveteau montra les dents. Je ne devrais pas risquer de me faire mordre Alors il commença à regarder autour de lui s'il pouvait trouver un bâton. Lorsqu'il était enfant il aimait jouer avec les chiens du quartiers, il jouait au bâton, il n'y a pas de raison que Eldurulfur n'aime pas ce jeu. Il vit et attrapa un bâton avec sa main droite et l'agita devant la tête du louveteau. Le chien remarqua l'objet et voulu l'attraper. "Va chercher" dit Donovan en lançant le bâton. Aussitôt l'animal couru chercher le morceau de bois.
Pendant ce temps Donovan décida de plier les genoux afin de faire circuler le sang dans ses membres inférieurs car la présence du chien lui avait donné des fourmis dans les jambes. Son animal revint avec le bâton et le déposa à la distance d'un bras de Donovan avant de s'asseoir gentiment à un mètre du bâton. Donovan lança donc à nouveau le bâton et le loup parti le chercher. Ils continuèrent à jouer pendant un moment et à chaque fois qu'ils jouaient,le louveteau rapprochait le bâton de Donovan et s'approchait lui-même du bâton. Il jouèrent plusieurs heures avant que Eldurulfur décida de poser le bâton dans la main de Donovan qui lui caressa le haut du crane pour le remercier.

Une fois lassé de jouer, Donovan se leva et se dirigea vers le grand mur qu'il avait vu ou plutôt vers les deux portes. Il n'avait pas fait 10 mètres qu'il ne trouvait plus son petit animal de compagnie. Il a dû disparaître, après tout on ne se connaissait que depuis ce matin, je ne sais pas encore quand il réapparaitra mais j'attends son apparition avec impatience. Donovan continua alors sa route seul vers les deux portes.
Le soleil était presque couché quand il arriva au pied des portes. Se retrouvant seul, il décida de crier vers le haut des portes et du murs:
" EXCUSEZ MOI, EST-CE QU'IL Y A QUELQU'UN?"
A peine avait-il fini sa question qu'il senti quelque chose lui tirer le bas de sa robe de mage il regarda donc ce qui tentait d'attirer son attention et il trouva à ses pieds son louveteau qui était réapparu, Eldurulfur

La nuit avait été longue. Très longue.
Il faut dire que le défi était de taille et il en était bien conscient.



Cela faisait maintenant plusieurs mois qu'il avait repéré sa trace. D'abord fugace, presque invisible, elle se mêlait à celle des autres animaux de la forêt, disparaissait parfois au milieu d'une sente ou près d'un ruisseau, pour mieux réapparaitre, de manière totalement aléatoire, à des lieues de là. Tantôt subtile et hésitante, elle se faisait par moment forte et reconnaissable pour mieux se faire oublier au bout de quelque secondes.

C'est au cours de ses nombreuses chasses estivales qu'il avait commencé à ressentir, plus qu'à la voir, cette présence. Une présence ténue mais puissante, qui semblait revenir sur chacun de ses terrains de chasse favoris. Il avait d'abord cru à une illusion, due à l'euphorie de la traque et au contentement d'un ventre plein après une journée de course. Mais il avait dû se rendre à l'évidence. Son instinct ne l'avait jamais trompé. Il y avait bien quelque chose.
La traque avait alors commencée. Des jours et des nuits durant, pendant des heures et des heures, il avait reniflé, humé, écouté, tourné en rond, fait des tours et des détours dans la forêt, à l’affut du moindre signe. Pendant des semaines, il avait remonté des pistes, morceaux de chemins olfactifs jusqu'à se retrouver à tourner en rond. Changeant de tactique, il avait alors recommencé à arpenter les bois touffus, notant mentalement tous les lieux où il trouvait trace de cette présence, tous les bosquets, tous les arbres, les ruisseaux et les terriers... Jusqu'à ce qu'enfin s'esquisse un schéma, un semblant de logique. Ragaillardi par sa découverte, il s'était alors mis au travail, remontant, petit à petit, pas à pas, le labyrinthe de traces. Couché dans les fougères, accroupi sur une branche ou caché sous un talus, il avait senti, jour après jour, cette présence de plus en plus forte.

Il avait atteint son but trois jours plus tôt, par une nuit de pleine lune. Tapi dans le sous-bois, à quelques pas d'une source claire, au fin fond de la forêt, il l'avait vu.
Grand et gracieux, les muscles roulant sous sa robe brune tachetée, son cou élancé tendu vers les cieux tandis qu'il écoutait les bruits de la nuits, sa ramure lui faisant comme une aura majestueuse sous l'éclat de la lune, il avait tous les atours d'un Seigneur. D'un roi même.
Cette nuit là, incapable de bondir sur sa proie, ni même de faire le moindre geste, il resta là de longues heures à contempler, subjugué, le Roi de la Forêt, jusqu'à ce que les premières lueurs de l'aube ne viennent rompre le charme. Silencieusement, il bougea une main, se coula hors du tapis de feuilles qui le recouvrait et releva la tête. C'est alors que leurs regards se croisèrent. Deux yeux bruns en amande, deux yeux jaunes à la pupille fendue. Il sembla s'écouler de longues secondes jusqu'à ce que le grand cerf rompe le contact. Il inclina alors la tête sans cesser de le regarder et, dans un bond, disparut dans les fougères, laissant l'homme-fauve derrière lui. Il s'était alors relevé, avait frotté la poussière et les feuilles de son pantalon et s'en était retourné sans mot dire jusqu'à sa grotte où il avait dormi d'une traite jusqu'au matin suivant.

À son réveil, un large sourire étirait ses babines. La traque pouvait recommencer. Et cette fois, elle ne serait pas à sens unique. Car il savait. Il avait vu dans le regard du majestueux animal que celui-ci le reconnaissait comme un ennemi, un adversaire digne de ce nom.
Son sourire s'étira encore plus et il fit jouer ses muscles avec plaisir. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas éprouvé pareille excitation avant une chasse. Histoire de se mettre en forme, il sprinta jusqu'à la ville, alla boire un grand bol de lait à la Taverne, prit un bain dans la rivière puis s'étendit pour une longue sieste à l'ombre d'un marronnier au feuillage clairsemé. Lorsqu'il ouvrit les yeux, il était prêt. S'élançant parmi les ombres du soleil couchant, il fila vers la forêt.




La nuit avait été longue. Très longue.
Mais il s'était sentit vivant. Bien plus vivant que d'habitude.

Il passa la langue sur son avant-bras ensanglanté et continua à boitiller sur le Sentier des Forestiers. Le soleil tombait et il arrivait à peine en vue de la ville lorsqu'un cri vint heurter ses oreilles. Il fronça les sourcils. Après une telle nuit, il ne rêvait que d'un bon lait chaud avant d'aller se rouler en boule devant une cheminée en pansant ses plaies et il n’appréciait guère qu'un olibrius trouble le calme de cette soirée à grands renforts de cris. Il s'approcha et, au détour d'un virage, alors que se dévoilaient enfin les majestueuses portes blanches de Sinastra, il découvrit un jeune homme de taille moyenne, aux cheveux noirs, escorté d'un jeune chiot. C'était lui qui s'égosillait à la porte.

Yorwan s'approcha en clopinant, passa devant le jeune homme, remarquant au passage que ce qu'il avait pris pour un chiot était un louveteau, et poussa les lourdes portes de bois blanc qui s'ouvrirent sans un bruit.

- Pas la peine de rester là à t'égosiller, mon gars, Lança-t-il d'une voix éraillée. Milo et Jozevitch doivent encore être en train d'enquiller des godets avant leur service du soir.

Il marqua une pause, le temps d'essuyer, d'un revers de main, le filet de sang qui lui dégoulinait de la nuque, puis se retourna vers l'inconnu à la porte.

- Alors ?! Tu entres ou tu comptes rester planté là toute la nuit ?

Donovan était incapable de savoir combien de temps il était resté près de ces portes, au bout de ce qui lui parut 20 minutes il hurla à nouveau
"OHE! IL Y A QUELQU'UN ICI?"
Aucune réponse ne lui revint mais il remarqua un détail bouger à l'extrême droite de son champ de vision, ce détail ressemblait à une silhouette.
Oh non, il ne manquait plus que ça, que je me fasse attaquer aux portes d'une cité
Mais contrairement à ce qui pensait, la silhouette s'approchait en claudicant, à mesure qu'il s'approchait, Donovan remarquait que cette silhouette était un homme Fauve, il avait lu un paragraphe sur cette race dans un des livres qu'il lisait étant jeune.  L'homme-fauve semblait blessé.  Il s'approchait de Donovan et ne semblait ni agressif ni même vraiment le remarquer.
Il passa devant Donovan et son compère lupin. Il m'ignore ou quoi?
Mais le nouveau venu poussa les portes, tourna la tête vers le mage pour lui indiquer que les gardes étaient sûrement absents et qu'il ne fallait pas crier pour ça. Il essuya sa nuque, Donovan remarqua qu'elle était ensanglantée aussi et l'inconnu tourna sa tête vers Donovan pour lui demander s'il comptait rester aux portes ou s'il voulait entrer.
Bien sur qu'il voulait rentrer, il regarda Eldurulfur, il avait disparu.
Alors Donovan remit sa robe de sorcier et avança.
" Je vais choisir d'entrer, je vous remercie"
Il commença alors à suivre l'homme-fauve à travers l'entrée.

Il se dirigea vers l'imposante fontaine qui trônait au centre de la Grand Place tout en jetant un regard en coin au jeune inconnu. Celui-ci sembla hésiter un moment, jeta un regard en arrière puis finit par entrer. Yorwan sourit. Sinastra faisait toujours cet effet là aux nouveaux arrivants.

Avec ses grandes portes de bois clair ouvrant sur une large place principale pavée de blanc, sa fontaine majestueuse sur le margelle de laquelle jouent une multitude de gamins, ses enfilades de rues, avenues et ruelles rayonnant autour de la grand place, la première vision qui s'offrait aux visiteurs avait de quoi couper le souffle.
L'homme-fauve se rappelait d'ailleurs très bien la première fois qu'il avait aperçu les hauts murs blancs de la Cité. À l'époque, malgré son état de faiblesse et sa haine du monde entier, il avait ressentit comme une vague d'espoir. L'espoir fou que cette ville serait différente des autres. Et c'était vrai.
Tout, de son château à son arène, de ses jardins fleuris à sa forge, de son académie à ses ruelles mal famées, tout à Sinastra respirait la liberté. La liberté d'être qui l'on voulait. La liberté d'assumer son passé ou de le renier. La liberté de se forger un avenir.

Il plongea les mains dans l'eau trouble de la fontaine et s'aspergea le visage avant d'y enfoncer ses avant-bras jusqu'aux coudes. Il resta là quelques secondes à regarder son sang se mêler aux volutes noirâtres qui avaient, depuis plusieurs mois, remplacés les eaux claires de la fontaine. Enfin, il se redressa, passa ses mains mouillées dans sa crinière emmêlée et s'ébroua, faisant voler autour de lui une multitude de gouttelettes. Les enfants qui se tenaient à distance de l'homme-fauve éclatèrent de rires clairs lorsqu'ils furent éclaboussés. Yorwan leur dédia un de ses fameux sourires, de ceux qui dévoilaient ses crocs imposants. Les gamins s'égayèrent en hurlant.

Essuyant ses mains sur son pantalon tâché, il se tourna vers l'inconnu. Le louveteau qui le suivait quelques minutes plus tôt semblait avoir disparu.
Yorwan se demanda un instant si le jeune homme savait où il était.

- Sinastra. Lâcha-t-il. C'est le nom d'cette ville. Mais on l'appelle aussi "la Cité Blanche". Pas besoin de t'expliquer pourquoi ? Ajouta-t-il avec un sourire ironique.

Yorwan esquissa un nouveau sourire en coin. Au moins, le nouveau venu n'avait l'air d'être un de ces timides, trop coincés pour oser l'aborder, ou trop peureux pour le regarder dans les yeux.
Il renifla et se passa la langue sur les lèvres. Le jeune homme avait une odeur intéressante. Une odeur de village humain, ancienne et persistante, comme un relent d'enfance heureuse mais qui commence à s'estomper. Des senteurs boisée venaient ensuite. De celles qu'on garde quelques jours après de longues heures de marche en forêt et qui, après une nuit accroché à une branche, vous collait aux cheveux et imprégnait vos vêtements. Enfin, ténue et délicate, il sentait une odeur animale. Sûrement en lien avec le louveteau de tout à l'heure. Et derrière tout ça, bien cachées mais persistantes, il reconnut les effluves âcres et persistantes de la magie.

Yorwan fronça le nez et éternua. Il n'aimait pas la magie. Non pas qu'il ait une dent contre elle, non, il n'avait jamais vraiment eu à faire à elle. Elle lui hérissait seulement le poil et le rendait méfiant. C'était plutôt quelque chose d'instinctif, inscrit en lui depuis des millénaires. Car les Hommes-fauves étant dépourvus de magie, il leur était impossible de comprendre ceux qui maîtrisaient cet art.
Mais Yorwan en avait vu d'autres.
Depuis qu'il était à Sinastra, il avait connu suffisamment de mage, sorcières et jeteurs de sorts pour savoir qu'ils n'étaient pas tous mauvais, et même parfois bien utiles. Mais il ne pouvait s'empêcher d'avoir des picotements dans la nuque en présence de magie.

L'inconnu se présenta soudain et, se retournant, il en profita pour le dévisager sans vergogne, de la tête aux pieds.

- Moi c'est Yorwan. Répondit-il tout simplement.

C'était comme ça. Pour lui, beaucoup de choses étaient simple. On lui donnait un nom, il donnait son nom. On lui servait à boire, il buvait. On le frappait, il mordait. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Cette fois, Yorwan ne sait pas si cela était commun à tous les hommes-fauves ou s'il s'agissait d'un de ses traits de caractère propre. Et à vrai dire, il s'en fichait.
Les formules bien choisies, les courbettes et les ronds de jambes, tout ça n'était pour lui que fioritures inutiles et, même si Maglor, dans son infinie bonté, avait bien tenté d'inculquer quelques bonnes manières à l'homme-fauve après son arrivée à Sinastra, Yorwan n'avait jamais réussi à intégrer le B.A-BA de la vie en société.

Ayant donc répondu à son interlocuteur, il tendit la main devant lui et cracha dedans avant de la porter à sa nuque. Puis, comme si de rien n'était, il reprit un semblant de conversation.

- Et donc... t'es ici pour un truc bien précis ou t'as atterrit là sans le vouloir ?

Il venait de cracher une nouvelle fois dans la paume de sa main lorsqu'il remarqua le regard étonné de Donovan. Il ne lui était venu un seul instant à l'esprit que son geste pouvait paraître étrange aux yeux de quelqu'un d'autre. C'était quelque chose qu'il avait l'habitude de faire chaque fois qu'il avait une blessure et qu'il avait appris à faire en observant ses congénères. Il faut dire que la salive d'un homme-fauve contenait un puissant cicatrisant.

- Ben quoi ? Lâcha-t-il en regardant sa paume luisante de salive. C'est pour guérir. Vous faites pas ça, v's aut' les humains ? Ajouta-t-il le plus honnêtement du monde avant de porter à nouveau sa main à sa nuque. Ça guérit mieux comme ça.

Le jeune homme regardait autour de lui et Yorwan se demanda si il s'en fichait ou si il était toujours sous le charme de la Cité. Lorsqu'il se retourna vers lui pour lui poser sa question, Yorwan resta coi. Politi-quoi ? Économi-quoi ?
L'homme-fauve ouvrit de grands yeux et regarda autour de lui. Il y avait du monde sur la Grand Place. Beaucoup de monde, comme tous les soirs, en fait. Des nobles, des bourgeois, des petites gens, quelques tire-laines aussi, des elfes sylvains, des lycans, des vampires au teint blafard... dont un grand nombre d'entre eux semblaient bien plus intelligents que lui. Nul doutes qu'en posant sa question à la cantonade, Donovan aurait obtenu des réponses pertinentes.
Mais voilà, le jeune homme ne s'était pas adressé à ce père de famille, ni à cette matrone. Non, il s'était adressé à lui.

Yorwan s'essuya les mains sur son pantalon, passa les pouces dans la bande de tissus qui lui servait de ceinture et fit la moue.

- Qu'est-ce j'en sais moi ? J'suis pas politicien ni économicien, hein. J'suis juste un chasseur qu'a rien pris de la nuit et qu'a le gosier à sec. Alors tout c'que j'pux faire pour toi, c'est de t'emmener à la Taverne. 'Fin... si ça t'dis.

-Oui, c'est de la magie, je suis un mage.

Yorwan grimaça. C'était bien sa veine, de tomber sur un satané Mage. Leurs réactions étaient toujours imprévisibles et on ne savait jamais quel sort ils allaient sortir de leur sac. Voilà pourquoi il s'en méfiait. De plus, un homme qui misait tout sur l'esprit ou un élément invisible et imprévisible ne faisait pas un bon partenaire de combat selon les critères de l'homme-fauve.
Mais après-tout, ils étaient dans la ville, au beau milieu de la Grand Place, entourés par une foule de gens qui se désintéressaient totalement d'eux. Que pouvait-il bien leur arriver dans ses conditions ?
Il jeta un dernier regard à la nuée de corbeaux qui coassait au dessus de leurs tête et haussa les épaules.

- On y va. Dit-il au jeune homme, en lui faisant signe de la main.

Ils traversèrent la place en laissant derrière eux les grandes portes de bois blanc et s'engagèrent dans l'étroit passage couvert qui se trouvait devant eux.
Cernés à gauche par la Bibliothèque Royale qui recelait tous les documents importants et archives du Royaume, et à droite par le mur sans fenêtre du Tribunal, ils avancèrent en silence. Au dessus de leurs têtes, le ciel disparut un moment, caché par les poutres et traverses de l'Intendance. Rares étaient ceux qui savaient ce qui se passait en ce moment au dessus de leurs têtes mais une chose était sûre : L'avenir de la Cité Blanche se décidait entre ces murs blancs perchés au dessus des toits.

Au sortir du passage, Yorwan obliqua vers le nord pour longer le mur du Quartier Noble.
Il y avait bien un chemin plus rapide pour rejoindre la Taverne mais l'homme-fauve voulait à tout prix observer la réaction de son compagnon, comme ils passaient devant les lieux emblématiques de la Cité. Ainsi, ils purent découvrir sur leur droite, la vitrine colorée de l'Atelier des Artistes puis, devant eux, se dressa celle, tout en hauteur, de l'Animalerie, dans laquelle s'agitaient de nombreux animaux dans leurs cages. Ils débouchèrent alors sur la Place Marchande, un lieu magique.
En son centre trônait un puits massif autour duquel de jeunes apprentis artistes avaient posé leurs chevalets et tréteaux. D'un côté s'ouvraient les devantures clinquantes des échoppes des Galeries Marchandes tandis que l'autre s'étalaient les tentures colorées des Artistes exposant leurs œuvres.

Yorwan ralentit le pas. Il y avait du monde et beaucoup de choses à voir... et son mollet blessé commençait à le tirailler quelque peu. Cependant, une fois la place traversée, ils eurent tôt fait d'atteindre la muraille du Faubourg et l'homme-fauve accéléra. Il n'y avait ici, plus grand chose à voir et il se reposerait une fois arrivés.
Quelques minutes plus tard, ils apercevaient enfin le mur délavé d'un établissement de grande taille comparé aux maisons voisines. Sur son enseigne de bois blanc était peint à l'encre baveuse la silhouette d'un chien efflanqué.

- Bienvenue à la Taverne du Chien qui Tousse ! Les accueillit une grosse femme portant un tablier taché. Qu'est-ce que ce s'ra pour vous ? Demanda-t-elle en regardant tour à tour l'homme-fauve et son jeune compagnon.

- Une chope de lait de Yack pour moi. Répondit Yorwan. C'est lui qui paye. Ajouta-t-il avant de se diriger vers un table d'angle.

Yorwan lorgna ostensiblement sur la chope de Donovan. Il n'était pas très courant que les gens demandent du lait dans un lieu où la bière et le vin coûtaient moins cher que l'eau potable. Finalement ce type n'avait pas que des défauts.

- Blessé ? Nan... c'est rien qu'une égratignure ça. L'animal qui m'a fait ça est... Magnifique, puissant et agile. S'il avait vraiment voulu me blesser, je serai encore en train de me trainer sur le Chemin des Forestiers, mes tripes à la main. Répondit Yorwan sans se soucier un seul instant de l'effet que le côté gore de sa déclaration pouvait éventuellement provoquer chez son auditoire.

Une femme à la table voisine, qui de toute évidence semblait écouter leur conversation, grimaça et détourna la tête. Yorwan eut un sourire en coin qui dévoila un de ses crocs. Plongeant le nez dans le liquide blanc, il observa la salle par dessus le bord de sa chope.

À cette heure de la journée, les Tavernes étaient déjà bien remplies et il régnait dans celle-ci un brouhaha confus qui ne dérogeais pas à la règle. La table à côté de la leur était occupée par trois femmes légèrement vêtues. À la façon dont elles observaient la pièce, il était évident qu'elles recherchaient des clients. Yorwan les ignora. Il n'était pas intéressé par ce genre de services. Deux tables plus loin, un elfe, reconnaissable à ses oreilles pointues et à la beauté qui émanait de tout son être, sirotait un liquide verdâtre en écoutant d'un air distrait ses voisins humains discuter de manière animée. Accoudés au bar, deux vampires dissertaient sur les vertus du demi-sang par rapport au sang pur, tandis qu'un nain au regard libidineux essayais de mettre la main sous le jupon de la serveuse à chacun de ses passages.

Une soirée habituelle, en somme.

- Et donc... Dit-il soudain comme s'il reprenait une conversation laissée en plan. T'es arrivé là par hasard ou tu cherches quelque chose en particulier ?

- Quelle créature était-ce ? Demanda Donovan.

Yorwan reprit une gorgée de lait de Yack tout en se remémorant la rencontre de la nuit passée. En fermant les yeux, il revoyait l'imposante ramure, les yeux en amande, le long cou gracieux, les pattes sveltes et musclées, les sabots fendus... Il rouvrit les yeux et regarda son compagnon avec une étrange expression. Il hésita encore un moment avant de se pencher vers Donovan pour murmurer :

- C'est le Roi de la Forêt : un grand cerf immense avec une robe argentée et des yeux dorés. Il fait au moins... quoi... 1m70 au garrot, Dit-il en mimant la taille avec sa main au dessus de sa tête. Et ses bois sont énormes ! C'est lui qui m'a fait ça. Ajouta-t-il en désignant du doigt son mollet zébré de rouge.

Il se tut un instant, regarda furtivement autour de lui, comme pour vérifier que personne n'avait entendu ce qu'il venait de dire puis reprit une gorgée de lait. Il ne voulait surtout pas que cette information tombe dans des oreilles indiscrètes. Après le temps qu'il avait passé en traque et le mal qu'il s'était donné pour découvrir, débusquer et chasser le grand cerf, il en avait fait une affaire personnelle. C'était comme s'ils étaient deux ennemis intimes destinés à s'affronter. Personne d'autre ne devait se mettre au travers de leur duel.

- Je te conseille de garder ça pour toi. Le Roi de la Forêt est à moi ! Ajouta-t-il sur un air menaçant.

Il appuya sa menace d'un long regard pesant puis, comme si de rien n'était, il sourit, leva sa chope et avala, cul-sec, le reste de son lait de yack.

- Ce que je fais dans cette ville ? Demanda-t-il surpris.

Étonné de cette question qu'on lui posait rarement, Yorwan s'accorda un temps de réflexion. Temps qu'il mit à profit pour héler un serveur au tablier crasseux et commander une deuxième chope de lait.

- Ben... ça fait presque 7 ans que je suis là. Répondit-il finalement en comptant sur ses doigts. Quand je suis arrivé, je n'cherchais pas grand chose. Juste un endroit où vivre tranquille. Sans être pourchassé, rejeté ou maltraité. Je ne pensais pas y rester aussi longtemps mais... C'est vrai que Sinastra est la Cité de la liberté. Chacun est libre d'y vivre comme il veut, quelle que soit sa race, ses origines ou son passé.